Le carnaval de Rio de Janeiro : une explosion de couleurs, de mouvements et de rythmes. Des chars somptueux, des costumes flamboyants, des danseurs captivants. Mais au-delà de ce spectacle visuel grandiose, une force invisible, une énergie palpable anime chaque cœur, chaque pas : la samba. Qu’est-ce qui, au-delà des costumes et des chorégraphies, insuffle à la samba sa couleur unique et son attrait irrésistible ?

La samba, bien plus qu’un simple genre musical, est une expression culturelle profonde, ancrée dans l’histoire du Brésil. Née des traditions africaines importées par les esclaves, elle a évolué au fil des siècles, s’enrichissant d’influences européennes et indigènes. De la samba de roda, un rituel communautaire festif, à la samba enredo, la trame narrative du carnaval, la samba se manifeste sous de multiples formes. Elle est le cœur palpitant du carnaval, le fil conducteur qui relie toutes les facettes de la célébration. Découvrez comment ces instruments traditionnels brésiliens donnent vie à cette musique entraînante.

Les piliers de la percussion : le rythme primal de la samba

La samba est d’abord et avant tout une musique de percussion. Les instruments qui composent la bateria, l’orchestre de percussions, sont les fondations sur lesquelles repose tout le reste. Ils tissent un rythme hypnotique, puissant et irrésistible, invitant à la danse et à la fête.

Surdo : le battement de cœur

Le surdo est le pilier central de la bateria. Il existe différents types de surdos, notamment le surdo prime, le surdo repique et le surdo corte, chacun ayant une taille et un accordage spécifiques. Fabriqués à partir de métal, de bois ou de fibres, ces imposants tambours marquent le tempo principal et enracinent le rythme. Le surdo prime, avec ses sonorités graves et profondes, procure la pulsation de base, tandis que les surdos repique et corte insufflent des variations rythmiques et des accents. La technique de jeu implique l’utilisation de baguettes et des techniques d’étouffement pour façonner des motifs complexes et dynamiques. Un percussionniste expérimenté exploite une variété de procédés, comme l’atténuation pour générer des sons sourds et les accentuations pour intensifier la mélodie. En résumé, les surdos définissent l’essence même de la Samba.

Caixa : l’ornement rythmique

La caixa, ou caisse claire, est un instrument primordial pour l’ornementation rythmique de la samba. Il existe deux catégories principales : la caixa de guerra, d’ascendance militaire, et la caixa de resposta, davantage utilisée dans la samba moderne. La caixa de guerra, avec son timbre sec et intense, confère de la précision et de la clarté au rythme. La caixa de resposta, avec son timbre plus riche et résonnant, ajoute de la couleur et de la subtilité. Le rôle de la caixa est de composer des motifs rythmiques complexes, de dynamiser les syncopes et d’enrichir la sonorité d’ensemble. Les percussionnistes utilisent des baguettes en bois ou en métal, et la modification du positionnement influence le rythme. L’histoire de la Caixa au sein de la Samba est remplie de rebondissements.

La caixa a connu une transformation captivante, évoluant d’un instrument essentiellement militaire à un composant créatif et expressif de la samba. Les batteurs de samba d’aujourd’hui expérimentent sans cesse de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux pour dépasser les frontières de l’instrument.

Tamborim : l’éclat scintillant

Le tamborim est un petit tambourin à cadre, fréquemment en bois ou en métal, qui offre une note d’éclat et de légèreté à la samba. Sa fonction est de conférer des accents aigus, d’élaborer des motifs rythmiques rapides et complexes, et d’alléger la sonorité globale. Le tamborim est habituellement joué avec une fine baguette en bois, désignée sous le nom de « nylon stick ». La technique requiert une grande précision et une rapidité d’exécution impressionnante. Les tamborimistes chevronnés manient une variété de méthodes de frappe, à savoir le frappé, le roulement et le rebond, dans le but de construire des motifs rythmiques complexes et fascinants.

L’utilisation du « nylon stick » a métamorphosé le timbre du tamborim. Il autorise la production d’un son plus clair, plus précis et plus percutant que les baguettes traditionnelles. La Samba a pu gagner en énergie grâce à cette amélioration.

Repique : le dialogue rythmique

Le repique est un petit tambour, souvent métallique, qui assume un rôle essentiel dans le dialogue rythmique de la samba. Il instaure un dialogue rythmique avec les autres instruments, comble les intervalles et augmente la complexité de la sonorité d’ensemble. Le repique est joué à l’aide de baguettes, et la technique englobe une vaste panoplie de frappes et d’accentuations sur les contretemps. En outre, le repique est utilisé pour transmettre des directives rythmiques durant le défilé du carnaval. Le Mestre de Bateria peut se servir du repique pour signaler les changements de rythme, les transitions et les improvisations, élément important de la batterie samba.

De nombreux percussionnistes recourent au repique en tant qu’instrument de communication, ce qui offre la possibilité de modifier les rythmes et les mélodies à tout moment. Cette polyvalence constitue un atout non négligeable lors des spectacles en direct.

L’harmonie subtile : les instruments qui colorent le rythme

Au-delà des instruments de percussion principaux, la samba se caractérise par l’emploi d’instruments qui apportent une harmonie subtile et colorent le rythme, composant essentiel de la musique carnaval.

Cuíca : la voix expressive

La cuíca est un instrument singulier et fascinant qui confère une couleur vocale distinctive à la samba. Il s’agit d’un tambour à friction, produisant un son exceptionnel et modulable qui rappelle un cri d’animal. Sa fonction consiste à injecter une couleur vocale, à imiter des cris d’animaux et à engendrer des effets rythmiques inattendus. La méthode de jeu implique l’utilisation d’une baguette en bambou frottée contre une tige interne, ce qui permet de nuancer le son en exerçant une pression variable sur la peau du tambour. La cuíca est souvent perçue comme la « voix » de la samba, lui conférant ainsi un impact émotionnel et expressif.

La cuíca est un instrument polyvalent qui peut être exploité pour élaborer une vaste palette d’effets sonores. Les percussionnistes expérimentés font appel à la cuíca pour improviser des solos virtuoses qui subjuguent le public. C’est un élément de percussion samba essentiel.

Agogô : le chant métallique

L’agogô est une double cloche en métal, émettant deux notes distinctes qui insèrent des accents rythmiques limpides et percutants dans la samba. Sa vocation est de ponctuer les transitions et d’ajouter une couleur métallique caractéristique à la sonorité d’ensemble. On joue de l’agogô en frappant les cloches à l’aide d’une baguette en bois ou en métal. D’origine africaine, l’agogô a été incorporé à la samba, contribuant ainsi à son évolution musicale.

L’agogô est un instrument simple mais efficace qui amène une touche d’authenticité et de tradition à la samba. Sa sonorité claire et percutante s’accorde à merveille avec les autres instruments de percussion.

Ganzá/chocalho : le voile sonore

Le ganzá et le chocalho sont des shakers, souvent façonnés en métal ou en plastique, remplis de petites billes. Leur rôle est de générer un fond sonore continu, d’introduire de la texture et de la délicatesse dans le rythme. Le ganzá et le chocalho sont fréquemment utilisés pour créer une sonorité enveloppante, ce qui enrichit la musique d’une dimension supplémentaire. La technique requiert de secouer, de faire rouler et de moduler l’intensité du shaker, de façon à concevoir des motifs rythmiques subtils et nuancés.

Le ganzá et le chocalho coopèrent pour constituer une « nappe sonore » enveloppante qui confère de la profondeur et de la richesse à la samba. Bien qu’ils ne soient pas prédominants, ces instruments contribuent à l’équilibre de la Samba et de la musique carnaval.

La mélodie et l’âme : les instruments qui chantent l’histoire

Bien que la samba soit avant tout une musique de percussion, elle intègre également des instruments qui insufflent la mélodie et l’harmonie, procurant ainsi une dimension émotionnelle et narrative à la musique.

Cavaquinho : le cœur harmonique

Le cavaquinho est une petite guitare à quatre cordes, considérée comme le cœur harmonique de la samba. Sa mission est de fournir l’harmonie, de jouer des riffs mélodiques et de soutenir le chant. Le cavaquinho est généralement accordé en accord ouvert, ce qui simplifie le jeu des accords et des solos. Les différentes techniques de strumming offrent la possibilité de créer des rythmes variés et complexes. Le cavaquinho produit un rythme unique et embellit le timbre distinctif de la Samba.

Le cavaquinho est un instrument polyvalent qui peut être utilisé pour interpréter une grande variété de styles musicaux. Néanmoins, il est particulièrement associé à la samba, au sein de laquelle il assume un rôle central. L’histoire du Cavaquinho remonte au Portugal, et fût amené au Brésil lors de la colonisation.

Violão : la fondation harmonique

Le violão, ou guitare acoustique, constitue la fondation harmonique de la samba. Son rôle est de procurer une base harmonique plus opulente et aboutie que le cavaquinho, de soutenir le chant et l’ensemble instrumental. Le violão sert à exécuter des accords complexes, des variations rythmiques et des solos mélodiques. L’empreinte des différents guitaristes de samba a permis l’évolution permanente de l’instrument. La guitare est bien souvent un héritage familial, transmise de génération en génération.

Le Violão est un instrument important pour toutes les musiques d’Amérique Latine, et pas seulement au Brésil.

Pandeiro : polyvalence et virtuosité

Le pandeiro est un tambourin à cadre avec cymbalettes, considéré comme un instrument à la fois percussif et mélodique. Sa fonction est d’établir une base rythmique, de composer des motifs complexes et virtuoses et d’improviser des solos. La technique de jeu requiert l’emploi de la main et des doigts pour frapper le cadre et les cymbalettes, engendrant ainsi une vaste palette de sons et de rythmes. Les « tapinhas » et les « placas » sont des procédés de jeu sophistiqués du pandeiro qui permettent de créer des effets rythmiques captivants et complexes. La légende raconte que le Pandeiro fût inspiré d’un instrument Arabe.

Le pandeiro est un instrument incroyablement polyvalent qui peut être mobilisé pour jouer une grande variété de styles musicaux. Il est, néanmoins, particulièrement associé à la samba, au sein de laquelle il est perçu comme l’un des instruments les plus importants.

L’ensemble et l’émotion : la samba comme langage universel

La samba ne se limite pas à une collection d’instruments individuels. C’est un langage musical complexe et riche, fruit de l’interaction et de la synergie entre tous les instruments.

L’interaction des instruments : un dialogue constant

La Samba ne se limite pas à un individu seul, elle est le résultat de l’orchestration et de la synchronisation de tous les instruments. Voici une brève liste qui souligne les spécificités de la Samba :

• Les instruments se complètent, se répondent et se magnifient mutuellement.
• Les rythmes complexes des caixas s’entrelacent avec les pulsations profondes des surdos.
• Les accents aigus des tamborins dialoguent avec les sonorités expressives de la cuíca.
• L’harmonie du cavaquinho et du violão conforte le chant et enrichit la musique d’une dimension supplémentaire.
• Les solos de repique et les improvisations à la cuíca insufflent des instants de virtuosité et d’émotion.

Chaque instrument occupe une place spécifique à un instant précis. Les agencements possibles sont illimités, ce qui explique l’existence d’une myriade de variations de Samba.

L’orchestration de la samba est un art délicat qui requiert une connaissance approfondie des instruments et une compréhension profonde du rythme. Les arrangements de samba sont fréquemment élaborés et exigent une coordination sans faille entre tous les musiciens.

Le rôle du mestre de bateria : le chef d’orchestre du carnaval

Le Mestre de Bateria est le chef d’orchestre de la bateria, chargé de diriger le groupe, de communiquer les arrangements et de susciter l’énergie de l’ensemble. Il exploite une combinaison de gestes, de sifflets et de mouvements pour communiquer avec les musiciens. La communication non verbale est essentielle pour garantir une synchronisation parfaite et préserver l’énergie du groupe. Le Mestre doit posséder une connaissance poussée de la samba et des instruments de percussion, ainsi que la capacité de motiver et d’inspirer les musiciens. L’élément essentiel, est de conserver l’âme de la Samba intacte, et de la faire rayonner auprès de son public.

L’impact émotionnel de la musique de samba : au-delà du rythme

La musique de samba véhicule des émotions profondes et universelles, qui touchent le cœur de tous ceux qui l’écoutent. Le plus souvent, la samba transmet :

• La joie
• L’espoir
• La nostalgie
• L’identité culturelle brésilienne

La musique de samba est une expression de la vie, de l’allégresse et de la fierté d’être brésilien. Elle transcende les frontières culturelles et linguistiques, rassemblant ainsi les individus dans une célébration commune. Les témoignages de danseurs, de musiciens et de spectateurs mettent en lumière l’expérience profonde et transformatrice que représente la samba. C’est pourquoi cette musique de carnaval est si spéciale.

Voici une liste d’artistes de samba à écouter pour mieux saisir l’essence de ce genre musical :

• Cartola
• Clara Nunes
• Beth Carvalho
• Noel Rosa
• Zeca Pagodinho

Pour aller plus loin dans votre exploration, visionnez le documentaire « Nelson Sargento » qui retrace la vie d’un des plus grands Sambistes de l’histoire. Disponible sur Youtube.

L’héritage sonore : l’âme du brésil

La samba, bien plus qu’une simple mélodie ou un simple rythme, est un langage musical riche et complexe, façonné par la synergie d’instruments variés. Chaque instrument apporte sa propre voix, son propre timbre, contribuant à l’énergie, à l’émotion et à l’identité singulière de cette musique emblématique. Les instruments de percussion posent la base rythmique, les instruments d’harmonie soutiennent la rythmique et les mélodies suscitent l’émotion. La Samba a engendré de nombreux genres musicaux actuels. Par exemple, la Bossa Nova est une variation de la samba, plus calme et mélancolique. Il existe un nombre incalculable de dérivés de la Samba, faisant d’elle une des musiques les plus riches du monde.

La samba poursuit son évolution, en intégrant de nouvelles influences et expérimentations. L’étude de ses instruments demeure essentielle pour cerner et apprécier pleinement sa richesse et sa beauté. Alors, laissez-vous porter par la magie sonore de la samba et partez à la découverte de l’âme du Brésil. Rejoignez le carnaval de Rio et laissez vous porter par les rythmes endiablés de la Samba !